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GWENNYN "Enez - "Il est une île"
Le site officiel de l'artiste

Il est des Compacts-Discs, enregistrés en public, qui, par leur texture inhérente, notamment, à une fidèle restitution du climat sonore et à l’intrinsèque structure de leur programme, parviennent à emmener les sens de l’auditeur jusqu’à la limite du plaisir que l’on peut ressentir en visionnant un DVD.
Avec ses 2 CD(s) enregistrés le 18 juillet 2024, lors d’une toute première représentation scénique donnée au Théâtre de Quimper, en ouverture du Festival de Cornouaille, « Enez – Il est une île » en est un parfait et représentatif exemple.

Il convient, aussi, de préciser que cette sensation d’intense et immersive présence se trouve, ici, renforcée, puisque ce nouvel et double album audio de GWENNYN, au-delà de relater un classique concert, transcrit, pleinement, un féérique spectacle de 95 minutes où, entre tradition et modernité, s’allient, se fondent, pour une onirique ode à la Bretagne, plusieurs expressions artistiques : Musique, chant, danse, chorégraphie, conte, sur écrin de costumes aux fils d’or, griffés du remarquable Maître créateur et brodeur, natif de Quimperlé, Pascal JAOUEN, l’ensemble étant baigné de lumières et d’ambiances musicales universelles, « made in Breizh ».


La superbe et « classieuse » jaquette, dont la conception graphique et les dessins ont été confiés au graphiste illustrateur finistérien Bastien COURTAY (Voir site) qui enserre les deux supports sonores, ainsi que le livret illustré des chatoyantes et, toujours, fort vivantes photos de l’excellent photographe Eric LEGRET, tous deux, tenus en mains et concomitamment et très agréablement feuilletés pendant l’attentive écoute, concourent à insuffler cette forte « impression visuelle ».

Nous profitons, toujours, de telles réalisations graphiques d’excellente facture, pour souligner l’intérêt que revêt la conception d’un bel objet qui réveille, pleinement, le culte de l’album, que l’on écoute du premier titre au dernier et, s’il vous plait, dans l’ordre des pièces proposées, ceci en complète opposition avec l’insipidité du format numérique en ligne qui, par ailleurs, spolie, allègrement, les artistes et que l‘on « consomme », trop souvent, ponctuellement et en vrac !... sans illustration, sans commentaire contextuel.
Nos visiteurs-auditeurs, nous le savons, demeurent très sensibles à ces belles intentions artistiques, aussi importantes et séduisantes dans leur forme que par leur contenu qu’ils véhiculent et qui, ainsi, mettent plus en valeur, encore, le propos.
GWENNYN se révèle, décidément, comme une constante ambassadrice de l’esthétisme intégral.

Nous avons évoqué le contexte « spectacle », évoquons, à présent et avec logique, sa « distribution » :

Pour la narration et le chant, omniprésente, GWENNYN est entourée du célèbre conteur Patrik EWEN et, pour quelques pièces, seulement, du chanteur Farid AÏT SIAMEUR, l’âme du groupe musical français et finistérien, TAÏFA (« Sales mômes », en berbère), formé en 1992 par ce chanteur algérien d'ascendance kabyle.
Côté musiciens, vous constaterez l’ample présence d’un, particulièrement, efficace équipage de fort talentueux instrumentistes, emmené par l’excellentissime guitariste, Patrice MARZIN qui signe, avec GWENNYN, toutes les musiques. Il est, brillamment, secondé par Manu LEROY, à la basse et aux claviers, Neven SEBILLE-KERNAUDOUR, aux Uilleann pipe, flûte et bombarde, Ronan ROUXEL, au violon et… Yvon MOLARD, aux percussions !

Comme, notamment, sur « Laridenn », vous aurez l’impression de, littéralement, voir cette très véloce et experte formation. Citons, aussi, pour la danse, créé en 2000, le cercle celtique issu du quartier occidental quimpérois du Moulin Vert,
« KORRIGONED AR MEILHOU GLAZ ».
Au cœur du spectacle, le « battle tradi et hip-hop » est assuré par le groupe de danse morbihannais de l’Amicale laïque de Cléguer, « BOUNCE NITED CREW ».

Quant au « synopsis » de ce spectacle, donc… de ce disque, principalement bilingue, où se côtoient, fusionnent même parfois, breton et français, et où vient s’additionner le kabyle, « Enez – Il est une île », se colore et se nourrit, ainsi, d’universel.
Entre rêve breton et onirisme celtique, il s’agit d’un voyage d’île en île, allégorie d’un cheminement intérieur, identitaire, introspectif.
« ENEZ » est une île qui n’existe sur aucune carte… C’est, clairement l’image, ô combien animée d’une quête universelle, celle de nos identités profondes et personnelles.

Chacun des tableaux qui composent cette flamboyante fresque est constitué d’une ou plusieurs chansons et/ou chorégraphies évoquant un univers particulier, spécifique, une couleur dominante, et des rencontres matérialisées par la présence des danseurs et des artistes invités.

Au titre de créatrice très inspirée de ce conséquent et ambitieux projet, GWENNYN, bien évidemment, mieux que nous pouvons le faire, définit, les fondations, les ressorts de ce puissant, viscéral et captivant récit, dit, joué et chanté :
« Á travers ce spectacle, je souhaite partager avec mon public des valeurs bretonnes qui me tiennent à cœur : l’authenticité, la mise en valeur de l’ancrage breton, une écologie spirituelle si intimement liée aux destinées des femmes- et l’esprit de créativité toujours en quête d’innovation et de transcendance, qui nous animent depuis la nuit des temps, en Bretagne… ».

Les deux premières pleines pages du livret, en breton, puis en français, vous livreront, sous la signature de GWENNYN un substantiel complément en matière d’intention artistique, culturelle, identitaire, humaine, transcendée par la créative artiste…
« Mon chemin est artistique. Ma matière onirique […/…] Bienvenue dans mon archipel, pour suivre le fil de mon voyage intérieur, conté à travers chants, en français ou en breton, la danse, les lumières, les parures et broderies, et même les fragrances », écrit-elle, entre autres.

Au cours des 21 morceaux qui composent les 2 Compact-Discs « Enez – Il est une île », vous retrouverez, entre musique électro et chansons, dans une autre dimension et parure scénique, 10 titres tirés des albums « Beo » (2013), « Avalon » (2016), « Imram » (2021) – (Notre chronique), les autres pièces étant des créations inédites, hormis « New Andro », paru sur « New andro – Best of » (2018) (Notre chronique).

La piste 1 du disque 1, de fait, en introduction du spectacle, propose, avec une exquise réverbération, merveilleusement dit, interprété, magnifié, par Patrik EWEN, un texte, du poète, écrivain et journaliste, défenseur d’une Bretagne vivante et ardente, Xavier GRALL (1930-1981) qui s’adresse à ses filles, ses « Divines », comme il se plaisait à surnommer ses cinq filles, en miroir au même nom donné, à sa propre fille, par le poète symboliste Pierre Paul ROUX, dit Saint-POL-ROUX.

[…/…] « J’ai tout aimé : les havres de Bretagne, à l’abri sous les pins tandis que dansent les malamocks sur le flux des marées. Le sel ! Le soleil ! Et ces voiles qui couraient sur la baie de Concarneau, comme des âmes inquiètes errantes, cherchant le paradis. […/…]».

L’extrait de ce long poème en prose tiré de « L’inconnu me dévore », textuellement, légèrement plus étendu que celui déclamé sur le disque, par le conteur, figure sur une double page du livret.

La narration de Patrik EWEN sert, ainsi, de prologue au spectacle et, bien naturellement, ouvre le CD 1.
Celle-ci commence, en solo, puis, à partir du passage textuel sus-retranscrit, est soulignée par une ascendante nappe sonore, avant que les percussion d’Yvon MOLARD se joignant aux programmations et à la magique guitare électrique de Patrice MARZIN, s’emparent d’une accélération rythmique, sur laquelle viennent, comme une mémorielle vague, déferler quelques notes du légendaire traditionnel « Eliz-Iza », puissamment coloré de la bombarde de Neven SEBILLE-KERNAUDOUR… et… et… le très vigoureux et tant attendu chant de GWENNYN, l’une des plus belles voix féminines de Bretagne. C’est « Mamm Douar » (La terre-mère) !



GWENNYN au coeur du spectacle "Enez - Il est une île".
Image extraite de la vidéo du teaser officiel (Voir).

Nous l’avons, déjà, écrit, « l’excellentissime guitariste, Patrice MARZIN », « La magique guitare électrique »… Eh bien, nous n’hésiterons pas, de nouveau, à insister, nous qui sommes des amoureux des cordes électriques, à souligner les fantastiques instants que Patrice nous réserve, tout au long du programme.
Ecoutez, réécoutez, « Deux voiles blanches » : Après la narrative intervention de GWENNYN, suivie de son puissant chant qui prend, ici, à notre oreille, des couleurs, toutefois dépourvues d’identiques vibrato, de la tessiture de Véronique SANSON, la magnifique ligne cordée de Partice, en pleins et déliés, vient conclure si brillamment cette pièce, en « guitar-hero », la teintant d’une « Rock and roll Attitude ».

Bien moins échevelée, mais fort joliment présente, dans l’instrumental dansé, « Laridenn », laissez-vous enlacer par les spires guitaristiques du brillant instrumentiste.


Que dire des électriques « vocalises » des cordes du guitariste qui interviennent dans l’avant dernier tiers de « Kan ar bed » (Le chant du monde), sur les percussions d’Yvon MOLARD, pièce conclue par l’enchanteresse GWENNYN, in fine, rejointe par les merveilleux entrelacs vocaux orientaux de Farid AÏT SIAMEUR.

Dans « La prophétie », après une apaisante et guitarisitique rythmique introductive, puis préfacée du suave violon de Ronan ROUXEL, très brillante intervention, également, de Patrice dont la guitare prend des saturations « Santanesques » pour laisser place au conteur Patrik EWEN qui évoque, quelques jours avant Noël, la présence de Merlin dans la forêt ainsi que l'épée magique du Roi Arthur, roi des Bretons dans les textes de la légende arthurienne… Excalibur !
« Seul le roi pourrait la tenir dans ses mains et desserrer l’étreinte de la pierre »…

Nous tenions, par l’évocation de ces titres, à souligner, entre autres exemples, l’importance et les évidents et pluriels talents du plus que complice, puisque compagnons de notes et de vie de GWENNYN, le compositeur, arrangeur, ingénieur du son et sacré guitariste !… Patrice MARZIN !

Les deux créateurs des musiques de cette superbe œuvre musicale et scénique, sont, de fait et dans la durée, sur une même ile créatrice, qu’ils parcourent sur des chemins, tour à tour, harmonieusement, parallèles, croisés ou à l’unisson, toujours complémentaires et valorisants pour les divers projets qu’ils mènent avec brio.
Nous pourrions, par exemple, illustrer, symboliser notre propos par la très fusionnelle interprétation de « Il est une île » où, notamment, la guitare de Partice semble chanter, en duo, avec l’intense et expressive voix de GWENNYN.
De son côté, l’Uilleann Pipe de Neven SEBILLE-KERNAUDOUR semble venir cautionner, adouber, de son enjôleuse plainte celtique, ce très beau couple de « cordes », qu’elles soient vocales, ou pincées.

Nous avons parlé, assez longuement… guitare.
Il serait injuste de ne pas citer le rôle des percussions d’Yvon MOLARD qui sont menées de « frappes de Maître » et qui apportent, ça et là, au cours du programme, la dimension universelle de cette culture bretonne qui, comme la péninsule qu’elle inonde, « regarde la mer »… les mers qui baignent d’autres continents.
Nous avons, à ce titre, savouré, l’excellent « Dañs ar Men », où, dans une frénétique et « celtic-world-trans » électro à laquelle se joint un chœur synthétique qui souffle de l’horizon l’envoûtant et emblématique thème d’« Eliz iza », les percussions d’Yvon s’unissent, très esthétiquement aux riches et mélodieuses programmations de Patrice, précédant l’énigmatique texte, mieux que dit par Patrik EWEN.

Il s’agit d’un extrait du « Câd Goddeu – le combat des Arbrisseaux », traduit par l’écrivain, poète, conteur et conférencier Jean MARKALE.
C’est un long texte, attribués au barde TALIESIN, figure importante de la mythologie celtique, poème dont les vers semblent être dénués de sens, parce qu'ils ont été délibérément mélangés.

Voici l’extrait que vous pouvez entendre sur le disque. Nous vous laissons le soin de « réorganiser », cette forme de
« suréalisme celtique » qui, dans la bouche du talentueux conteur, sonne aussi « musical », que mystérieux !

« J’ai revêtu une multitude d’aspects
avant d’acquérir ma forme définitive,
il m’en souvient très clairement.
J’ai été lance étroite et dorée,
je crois en ce qui est clair,
j’ai été la plus profonde des étoiles,
j’ai été goutte de pluie dans les airs,
j’ai été mot parmi les lettres,
j’ai été livre dans l’origine,
j’ai été lumière de la lampe,
Ainsi, pendant une année et demie,
j’ai été un immense pont
jeté sur trois vingtaines d’abers.
J’ai été chemin, j’ai été aigle,
j’ai été bateau de pêcheur sur la mer salée,
j’ai été victuaille du festin,
j’ai été une épée dans l’étreinte des mains,
j’ai été bouclier dans la bataille,
j’ai été corde d’une harpe,
ainsi pendant neuf années.
Dans l’eau, dans l’écume,
j’ai été éponge dans le feu,
et j’ai été arbre au bois mystérieux.
Et j’ai été arbre.
».

En ultime piste du CD1, nous ne pourrons, également, taire ce merveilleux moment symbolisant les rencontres musicales et culturelles extra-armoricaines, où le suave violon de Ronan ROUXEL, délaissant ses spires celtiques aux couleurs irlandaises qu’il fait danser au cours du programme, s’orientalise et, en discrète voix chorale, semble chanter avec Farid AÏT SIAMEUR une délicieuse et joyeuse berceuse qu’en prologue de son exécution, le chanteur kabyle, prend soin de contextualser :

[…/…]
« Une douce brise arrive comme un présage pour fêter l’arrivée d’un nouveau né ! ».
Au dernier tiers de la pièce, le chaleureux violon de Ronan fait lever le soleil d’orient, puis raccompagne l’artiste, jusqu'aux dernières notes. Un instant suspendu !

Si, pour quelques titres, lorsque tous les instruments rivalisent de puissance, nous aurions apprécié un mixage un peu plus équilibré permettant de mieux faire ressortir, en parfaite compréhension du texte la très belle et tonique voix de la chanteuse, ce double opus « Enez-il est une île » est une grande réussite, car pour ceux qui ont vu ce spectacle aérien et haut en couleur, c’est, au plus près de l’ambiance de la salle quimpéroise et des applaudissements nourris et très largement mérités, d’un enthousiaste public qu’ils se remémoreront et garderont dans leur âmes ces instants artistiques d’exception.
Pour les autres, comme nous-mêmes, qu’elle belle, non pas, « bande », mais « fresque annonce » qui donne grande envie de découvrir, sur scène, cette originale et grandiose création.

« Enez – Il est une île »… Un double album à vous procurer, au plus vite, pour, notamment, enjoliver vos prochaines vacances, où vous aurez tout le temps d’écouter, réécouter, déguster cette ode passionnelle à la Bretagne !

Une nouvelle fois, dans l’absolu esthétisme, l’amour de sa terre… et mer, de sa terre-mère, avec sa féminine conviction, GWENNYN et « sa troupe », nous étonne, ébahit, éblouit … nous conquiert.

Gérard SIMON


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Nous vous proposons d'écouter 3 extraits de l'album : "Da Belec'h ?",
"La Prophétie" et "Dis-moi ma soeur" (05:12).
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Les titres du CD du spectacle « Enez - Il est une ïle » :

CD - 1
01 - Mamm-Douar - 06:40.
02 - Deux Voiles blanches - 05:25.
03 - Me Ivez - 03:53.
04 - Laridenn - 05;08.
05 - Bleunioù pop up - 04:01.
06 - Dañs ar Mein - 05:37.
07 - Le Phénix - 03:11.
08 - Da Belec'h ? - 03:15.
09 - Kan ar Bed - 05:40.
10 - Sussem Tura - 05:30.
11 - Aya Lxir Inu - 05:49.
CD - 2
01 - Le Voyage de Bran - 02:27.
02 - Il est une île - 03:43.
03 - Ur Yezh All - 03:41.
04 - Filles du vent - 04:34.
05 - La Prophétie - 02:39.
06 - Excalibur - 04:29.
07 - Dis-moi ma soeur - 03:17.
08 - New Andro - 03:39.
09 - Bravig - 05:04.
10 - Son ar Chistr - 04:15.

Durée totale : 91:57.


CD du spectacle « Enez - Il est une ïle ».
Parution : 31 mai 2025.
Réf : AR1237.
Distribué par : ARFOLK - www.arfolk.bzh

© Culture et Celtie

Illustration sonore de la page : GWENNYN - Album "Enez - Il est une ïle" - "Mamm-Douar" - Extrait du CD1 de 01:00.
Site Internet de GWENNYN : gwennyn.com

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