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Clarisse LAVANANT - "Kan Ar Yezh" |
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« C’est « le disque de ma vie »… Au fil d’antérieures, fondatrices et fort réussies publications discographiques, dont nous ne vous avons, sur nos pages en ligne et par nos chroniques, présenté que quelques chapitres, « Ici » – 2022 (Voir), « De Kerouze à Ouessant » – 2019 (Voir), ou dans notre rubrique « CD A RETENIR », « Kantikoù Breizh yezh – Cantiques de Bretagne » – 2018 (Voir), et parallèlement à ces séduisantes parutions, notre |
sirène morlaisienne a porté et espéré ce présent et primordial projet d’enregistrement, pendant dix ans ! Il y a, déjà, plus de 15 ans que Clarisse, a, en effet, commencé à chanter en breton, lorsqu’elle est revenue s’installer en Bretagne, grâce aux chansons de GLENMOR qu’elle a apprises et enregistrées dans le premier volume de la trilogie qu’elle lui a consacrée, à savoir, « Mémoire Vivante » (2009), « Je Te Souviens Glenmor » (2011) et « Glenmor Vingt ans d'abord » (2016). Afin de bien mieux encore, de l’oral à l’écrit, appréhender la langue, les débuts de cette triple interprétation-hommage discographique relative au répertoire du célèbre barde engagé, compositeur-interprète, écrivain et poète de langue française et bretonne, engendra pour notre bien aimée artiste, le déclic initiateur de son volontariste et assidu apprentissage du Breton. Après cette prime création, désirant aller encore plus profondément, dans la connaissance linguistique, l’artiste entreprend, en 2014, une formation intensive de plusieurs mois avec l’organisme de formation au breton STUMDI, à Landerneau (Voir site). Au-delà de saluer, comme il se doit, tout volontariste et opiniâtre parcours d’apprentissage, la succession des étapes, ci-dessus, évoquée permet de pleinement comprendre le fondamental bonheur que peut ressentir, à présent, cette légitime voix bretonnante qui, en quelque sorte, vit intensément, une seconde naissance artistique et culturelle. « Kan ar yezh » apparait, ainsi, comme un marqueur discographique majeur dans le parcours de l’artiste qui, désormais, est intégralement immergée chant, cœur et âme dans le pays qu’elle aime au plus profond de son cœur et de son âme et dont, cette fois, en version originale, par ses totales créations, elle nous inonde merveilleusement et généreusement de ses intrinsèques saveurs linguistiques, racinaires, musicales… identitaires. Afin de plus, encore, donner profonde et intime essence à ce passionnel projet, l’enregistrement de « Kan ar yezh » est resté ancré en pays de Morlaix, berceau de vie de la chanteuse, au cœur d’un inspirant coin de campagne, jouxtant la ville trégoroise et léonarde. Puisque nous venons de nommer Philippe GUEVEL, il faut, impérativement, souligner son très important et, ô combien, talentueux rôle dans la réussite de l’opus. Que de riches et fins arrangements et, de la ballade, au jazz, au reggae, en passant par le pas dansé breton, que de styles divers, d’ampleurs de sonorités allant de la géométrie instrumentale d’un intime piano-voix, au vigoureux combo, de la formation «chambresque » (excusez ce néologisme osé !), de cordes, jusqu’aux majestueuses grandes orgues. Magnifiquement survolé en spires et volutes ou caressé en intime proximité par, successivement, le doux ou le puissant, toujours limpide, éclairant chant de Clarisse, l’album « Kan ar yezh » propose à votre écoute 12 titres originaux, dont les textes en breton et les musiques sont fruits de la créative sensibilité de la chanteuse. Ah ? Un programme de 58 minutes, chanté à 100% en langue bretonne… et pour les non-locuteurs ?… Pas d’alarme ! Tous les titres, sont, dans l’ordre et en regard de leur originale écriture, traduits en français sur les pages du livret de 24 pages joint au Compact-Disc. Offert pour célébrer son 10ème anniversaire à la Redadeg (« Course », en breton) qui, à travers la Bretagne, est une course à pied de relais destinée à populariser la pratique de la langue bretonne, rappelons-le, toute première pièce originale écrite en langue bretonne, par Clarisse, portant en son texte, l’essence même du disque à l’éponyme intitulé, il paraissait évident que la chanson « Kan ar yezh » ouvre le programme. |
[…/…] Evel ur chañs Hag ur choaz ivez Hiziv ha bemdez Spered ur bobl Hag istor ur vro Digor war ar bed Kan ar yezh… |
[…/…] Comme une chance Et aussi un choix Aujourd’hui et chaque jour L’esprit d’un peuple Et l’histoire d’un pays Ouvert sur le monde Le chant de la langue… |
Vous retrouverez ce thème linguistique central marquant l’importance, pour la chanteuse, de la vitale pratique de la langue bretonne, en piste 7, au sein d’une exquise berceuse « Kousk Aelig – Dors petit ange ». Par Philippe GUEVEL, accompagnée, littéralement mise en scène sonore par un tintement de célestes notes semblables à celles qui s’échappent des mobiles qui, au dessous de leurs berceaux, favorisent l’endormissement des petits, cette composition rapproche l’idée de la non-venue d’un espéré et imaginaire et enfant ; une frustration maternelle compensée par une autre naissance… l’arrivée, dans sa vie quotidienne… de la langue bretonne. |
[…/…] N’out Ket deuet Bugel ebet Er c’havell N’out ket ganet Morse nemet barzh va fenn Kousk… Bevañ a rez Padal e kreiz va c’hanenn Hag e kreskes Rak va bugel Eo va yezh |
[…/…] Tu n’es pas venu Il n’y a aucun enfant Dans le berceau Tu n’es jamais né Ailleurs que dans ma tête Dors… Tu vis portant Au creux de ma chanson Et tu grandis Car mon enfant C’est ma langue |
![]() Clarisse LAVANANT- © Photo Gérard Classe. |
Très jolis et émouvants instants, dont l’initiale mélancolie s’éteint, peu à peu, avec la venue, en re-recording, sur « cordes pincées synthétiques », d’un enthousiaste et vivifiant chorus vocal et rythmique. Ligne musicale Idéale pour revendiquer une identité et affirmer des valeurs, c’est, cette fois, en piste 10, sur un rythme de reggae que Clarisse, lassée et quelque peu en colère (que de badadavs… patatras !), revendique, enfin, la pleine reconnaissance de l’usage naturel et élargi de la langue bretonne. Au dernier tiers du morceau, s’insère le son d’un bugle donnant à ce quasi « Breizh prostest song » aux couleurs jamaïcaines, un caractère revendicatif festif et collectif. |
[…/…] Peur ‘vo dibabet ganeomp Hor bloavezhioù a zeu Ha gallout komz yezh hor C’halon […/…] |
[…/…] Quand déciderons-nous De notre avenir Et pourrons nous parler la langue de notre cœur […/…] |
En ce qui concerne ce majeur volet linguistique, son apprentissage et sa courante pratique, clefs de voute de l’édifice « Kan ar yezh », Clarisse n’omet pas de remercier, par quelques couplets, ses amis locuteurs de STUMDI, à Landerneau. La langue, c’est la couleur avec laquelle on dépeint le mieux le pays auquel on est viscéralement attaché. |
[…/…] Setu va bro Ar vro ennon Betek fin va buhez |
[…/…] Voici mon pays Le pays que je porterai en moi Jusqu’à mon dernier souffle |
L’amour du pays… c’est précisément le titre d’une iconique chanson dont le texte est d’Anjela DUVAL et mis en musique par Véronique AUTRET, du groupe GWALARN. Un célèbre poème de la paysanne trégoroise qui raconte la blessure de jeunesse au cœur d'une femme qui n'a pas voulu quitter sa Basse-Bretagne pour suivre le marin qu'elle aimait, un homme aux goûts si différents des siens ! Ce pays de Bretagne à qui il manque, toujours, l’un de ses cinq enfants originels et légitimes ! Dans une coloration musicale inattendue, franchement jazzy, dont l’introduction rappelle le standard « Take five » la réunification est, à nouveau, exprimée, en conclusion d’un questionnaire de Proust, d’un portrait chinois, titré « Ma vijes lâr din-me). |
[…/…] Ma vijes ul lezenn Pehini e vijes An hini a lakte ar broioù nunanmet An hini a lakfe va bro adunanet |
[…/…] Si tu étais une loi Laquelle serais-tu ? Celle qui unirait les pays Celle qui réunifierait mon pays. |
Clarisse chante, aussi, au fil du temps qui s’écoule et qui efface presque tout, nous laissant que le meilleur, c’est, en piste 5 « Tremen a ra – Passe », des moments d’amour, présents et intemporels, avec, en piste 11 « Te a garan – Toi que j’aime ». Quoi de plus explicite ? Dans « kan ar yezh », figurent, aussi, des propos de résilience (« Son ar joa », adapté du traditionnel « Son ar sistr »), d’universalisme, comme dans « Deuit da zañsal » : |
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Keit’ ma vo dañset diouzh an deiz Tud eus pep lec’h… |
[…/…] Tant que l’on dansera le jour Gens de partout… |
Nous arrivons au terme de notre longue, mais encore parcellaire et imparfaite approche thématique qui élude bien d’autres aspects de ce riche « Kan ar yezh ». Mais il faudrait 10 pages pour envisager toute la substantifique moelle de ce très bel opus. Aussi, nous nous devons de préserver votre écoute et votre propre découverte. En piste 14, Clarisse reprend « Douar ». C’est un abondant plaidoyer textuel et musical, puisque vous écouterez, alors, la plage la plus étendue du disque. Il s’agit de paroles écrites par Clarisse LAVANANT, unique texte, chanté en breton, qui figurait, en piste 13, sur l’album « Earth » de, la toute aussi, finistérienne, Aziliz MANROW, chanteuse et compositrice et de la mélodie qui avait sollicité l’une ses préférées référentes plume bretonnante. Pour clore l’approche de ce superbe opus, c’est avec l’ultime « Meulgan Ar Merc’hed - L’Hymne des femmes », écrit sur l’air du « Chant des Marais » (*1*), ici, revisité et enregistré en 18ème position du disque que nous nous quitterons. Amis, fidèles visiteurs de Culture et celtie, l’e-MAGazine, vous qui aimez les très belles voix de Bretagne, enjolivées de la langue bretonne qui, de ses entrailles de granit, à son épiderme de dune, traduit, à merveilles, l’Armor comme l’Argoat, la nature, le pluralisme, l’universalisme, vus de ce pays péninsulaire qui regarde la mer… et les autres, nous vous incitons, vivement, à vous procurer ce magnifique et nouvel album, pleinement réussi. Vous retrouverez vocalement une Clarisse aussi sereine, proche et lumineuse que sur le portrait signé, du photographe quimpérois Bernard GALERON (Voir site), qui illustre la jaquette et, avec un sourire additionnel, la première page du livret, très agréable vision, réalisée au plus près du contenu de l’enregistrement. Délibérément autoproduit, sous le label Mus’Iris, vous pouvez, aisément, vous procurer cet excellent Compact-Disc, sur la page du site officiel de l’artiste (Voir page), ou sur la page du site d’EPM Musique (Voir page). Si, depuis des années, principalement en français, Clarisse chante remarquablement bien son pays de passion, la Bretagne, pareil au chant d’un cristallin, puissant mais nuancé et enjôleur son de harpe celtique, par la virtuosité de son breton appris et acquis, elle renforce, encore, son identité vocale par ce brillant « Chant de la langue ». « Hep Brezhoneg, hep Brezhoneg, Clarisse, par son volontariste exemple d’apprentissage et par sa bretonnante et superbe création mélodique et textuelle, nous le fait, une nouvelle fois, comprendre. Gérard SIMON ____________________ |
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Nous vous proposons d'écouter un medley de 3 extraits de cet album : "Divalay ki", "Keranden" et "Deuit da zansal" (04:23). |
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Les titres du CD Kan Ar Yezh" : 01 - Kan ar yezh - Le chant de la langue - 03:11. Durée totale : 58 minutes. |
CD "Kan Ar Yezh" - Clarisse LAVANANT | ![]() |
© Culture et Celtie |
Illustration sonore de la page : Clarisse LAVANANT - "Kan ar yezh" - Extrait de 00:58. Le site Internet de Clairsse LAVANANT : clarisselavanant.wixsite.com/site-officiel |