Page sonorisée


Tangui LE GALL-CARRÉ - "Neus"

La page de l'artiste

La jaquette du Compact Disc que nous avons reçu, graphiquement composée par Nolwenn BLOUIN (Voir site), à partir de clichés en noir et blanc de l’artiste, signés du talentueux photographe Eric LEGRET (Voir site), esthétiques images filtrées, en première de couverture, d’un voile dégradé de rouge carmin, couleur reprise, plus uniformément pour la majorité des autres pans du Digipak, semble, d’entrée et de visu, donner le ton du programme musical proposé.

Le rouge est une couleur de référence dans toutes les civilisations qui, avec ambiguïté, représente la vie, mais aussi la mort, tout en traduisant la positivité, puisqu’associé à l’action, l’énergie, la détermination, la passion, l’émotion, l’amour, la sensualité, le plaisir…
Pour preuve, cette couleur est, très souvent, dominante dans les lieux de plaisir et de divertissement, comme la décoration des théâtres, des opéras, des cabarets et des cinémas.


Nous retrouvons toutes ces notations dans ce sanguin, viscéral, intense, mais aussi, voluptueux 1er album solo proposé par le fort connu et reconnu accordéoniste, depuis 30 ans, compositeur et arrangeur, originaire du Centre Bretagne, en ces temps, finistérien… Tangui LE GALL-CARRÉ !

Ne vous étonnez pas de la vélocité et de la sensibilité de son jeu, confirmées, affirmées, au fur et à mesure du temps et de ses multiples expériences artistiques, puisque, dès l'âge de 8 ans, il découvrait l'accordéon diatonique grâce à son professeur… Fred GUICHEN !
Par la suite, et, notamment, depuis 1997, le musicien a composé et arrangé de nombreux airs et, élargissant ses influences, effectué de nombreux voyages, en Espagne, Allemagne, Pologne, Pays-Bas… jusqu’en Chine !
Présentement, c’est après six albums avec le célèbre groupe breton de concert et de fest-noz, STARTIJEN (1), ainsi que deux enregistrements, en duo, avec le guitariste Erwan MOAL (2), plus récemment avec le spectacle et CD « Strollad AR VRO BAGAN - War Hent Youenn Gwernig » (3) dont il est, bien évidemment, l’accordéoniste, mais aussi, l’un des arrangeurs, que le moment était venu, pour Tangui LE GALL-CARRÉ de publier son premier opus en nom propre, en le titrant, pour hommage à sa fille disparue, en janvier2021, « Neus » (Neige, en catalan).

Tangui a souhaité, néanmoins, maintenir l’enregistrement, antérieurement fixé à une date se situant, désormais, après deux semaines de ce dramatique événement.
« Il fallait aller jusqu’au bout… sortir l‘album comme une libération… en souvenir de notre fille », confie-t-il dans une courte vidéo publiée en ligne.
Lorsqu’à l’orée de notre chronique, nous parlions de la palette de codifications symboliques pour la couleur rouge, à tous les mots évoqués, nous pouvons ajouter celui de… résilience !

Voici, donc « Neus », le premier opus solo de Tangui LE GALL-CARRÉ !
Il faut nuancer, certes quelque peu, le qualificatif « solo », puisque l’accordéoniste a choisi de se faire entourer par des compagnons de route, des musiciens de la scène bretonne et irlandaise, et pas des moindres, tous, amis de longue date ou fortement appréciés de Tangui.
Mais quand, sous l’expert touché du virtuose, la « Boîte du diable », Boest an diaoul, en breton n’intervient pas seule, celle-ci reste, toutefois, toujours, en figure de proue, en occupant pleinement pour chaque pièce, magistralement interprétée, un espace stéréophonique soigné.
Profitons de cette observation auditive pour saluer le travail sonore, de Tangui OILLO, à la prise de son, Ludo MESNIL, au mixage et Cormac O’KANE, de RedBox recording (tiens, encore du rouge !), in Belfast !



Tangui LE GALL CARRÉ - © Photo Eric LEGRET

Temps est, donc, venu de vous présenter cet équipage instrumental, autant efficace, que serviteur du projet de Tangui.
Blottis contre l’accordéon diatonique du soliste, nos retrouvons :

Les irlandais :
- John Joe KELLYy au bodhrán,
- Dónal O’CONNOR, au fiddle,

Les bretons :
- Sylvain BAROU, à la flûte traversière en bois,
- Ronan LE BARS, à l’Uilleann Pipes,
- Ronan PELLEN, au cistre,
- Julien STEVENIN, à la basse et direction artistique.


Comme vous le constatez, nous sommes en pays de connaissance et si, pour certains d’entre-eux, vous ne mettez pas un visage sur les noms des instrumentistes intervenants, le livret joint au disque, est, excepté, en première et quatrième de couverture, dédiées à Tangui, entièrement consacré à la présentation photographique des musiciens invités, ceci, grâce aux artistiques clichés en noir et blanc, d’Eric LEGRET, Tony MAILLARD, Con KEKKECHER et Julie An ROQUETTE.

Même si, à l‘écoute attentive de cette séduisante publication musicale, nous pouvons percevoir de multiples influences stylistiques et géographiques, le programme présenté reste, nous pouvions nous y attendre, notamment, eu égard à la distribution précitée, largement d’inspiration conjointe, bretonne et irlandaise.

« Neus » est un album, entièrement instrumental.
Avec modestie et humour, Tangui ajoute, dans la vidéo en ligne, déjà évoquée :
« Je ne chante pas assez bien, sans doute », mais, néanmoins, le musicien semble laisser la porte ouverte à un prochain opus où sa voix serait présente.

Plus de 46 minutes de grande proximité, je dirais, d’intimité, d’authentique générosité, de sensuelle séduction, vous attendent, au travers de 13 titres, tous, des compositions intégrales ciselées par le brillant artiste.
Comme il le fait pour son instrument fétiche, l’accordéoniste semble vous enserrer dans se bras, pour mieux vous emmener dans ses très profonds et changeants sentiments qui dictent, littéralement, ses créations.
L’échange, le ressenti sont intenses… C’est rouge !

Toutes les plages musicales, sensiblement interprétées, avant tout, nous le ressentons, profondément vécues, apparaissent, tour à tour, mélancoliques ou enjouées, quasi bluesy ou diablement énergiques, pour nous, auditeurs captifs… énergétiques !
« Cet album est une somme de diverses sensations. Parfois, il y a des airs plutôt mélancoliques, calmes, parfois plus énervés, plus joyeux », ajoute Tanguy dans le vidéogramme publié sur internet.
On passe, en effet, et c’est l’une des richesses de cet excellent et varié panorama expressif musical, des tristes, obsédantes et nuancées spires de « Neus », des solitaires langueurs de « An Anfin » ou des larmes de l’éternel souvenir de « An Daeroù », à la virevoltante « Tarzh an deiz/Serr-noz », ou aux effets sonores « Wah Wah » débridés qui s’emparent, soudainement, de la quelque-peu pseudo-argentine, « Ker Annig ».

Ajoutez à ces pleins moments d’accordéon, pour d’autres titres la subtile et persistante flûte traversière en bois de Sylvain BAROU, le légendaire et référant Uillean Pipes de Ronan LE BARS, l’alerte fiddle de Dónal O’CONNOR, le baroque cistre de Ronan PELLEN, le coloré bodhrán de John Joe KELLY et vous obtenez des conversations musicales de toute première facture.
Citons, pour exemple, en plage 5, la suite « Niembru / Madinina’s jig / Suchard’s favorite », où, de surcroît, la basse de Julien STEVENIN ronronne de ses plus belles et rondes profondeurs.
C’est aussi, véridique, en piste 11, où « Kevin’s reel / The session », est digne des plus endiablés fleadhs, ces rassemblements irlandais, particulièrement festifs, où l’on y entend tous types d'instruments traditionnels où, encore, ces céilithe, durant lesquels les pas de danse martèlent la frénétique musique.

Intégralement forgé à partir de compositions originales abouties, émanant des racines traditionnelles, principalement irlandaises et bretonnes, mais pas que, cet incandescent album ravive, avec panache et intensité, la flamme néo-celtique et, lors de chaque réécoute, ranime les braises rougeoyantes de nouveaux attraits.

Suite à ses nombreuses rencontres, humaines et artistiques, ses multiples tournées en groupe ou en duo, Tangui LE GALL-CARRÉ a élaboré et acquit une écriture, un style, un son, un jeu, une présence qui lui sont propres et bien reconnaissables.
Pas étonnant que Tangui soit devenu un acteur majeur de la nouvelle scène bretonne, ouverte sur le monde.

« Neus », de Tangui LE GALL-CARRÉ, est, parmi bien d’autres qualités, sus-évoquées au cours de cette chronique, un opus intense, sincère et chaleureux à faire entrer, sans attendre, dans l’âtre de vos intimes préférences musicales.

Gérard SIMON

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Nos chroniques :
(1) « Paker Tour - Live » (Voir).
« Skeud » (Voir). Album « A RETENIR » :
(2) « TouellwelI » ( Voir).
Notre chronique :
(3) « Strollad AR VRO BAGAN War hent Youenn Gwernig » (Voir).


Nous vous proposons d'écouter un medley de trois titres extraits de l'album : "An anfin", "Kevin’s reel / The session" et "Daeroù" (03:41).
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Les titres du CD de Tangui LEGALL-CARRÉ : "Neus".

01 - Tarzh an deiz / Serr-noz - 03’29.
02 - Neus - 03’34.
03 - Ker Annig - 03’43.
04 - An anfin - 02’50.
05 - Niembru / Madinina’s jig / Suchard’s favorite - 04’32.
06 - Nozvezh didermen - 03’51.
07 - Anhun - 03’29.
08 - Fulor / Follentez / Distan - 04’09.
09 - Milendall - 02’49.
10 - Luminosa oscuridad - 04’02.
11 - Kevin’s reel / The session - 03’26.
12 - D’am breur / Ar beajour - 04’06.
13 - Daeroù - 02’16.

Toutes compositions de Tangi Le Gall-Carré


CD Tangui LEGALL-CARRÉ - "Neus".
Parution : novembre 2021 - Réf : 4016446.
Edité chez PAKER Prod - www.pakerprod.bzh
Distribué par Coop Breizh - www.coop-breizh.fr

© Culture et Celtie

Illustration sonore de la page : Tangui LEGALL-CARRÉ - Album "Neus" - "Tarzh an deiz / Serr-noz" (Extrait de 01:06).
La page de l'artiste : ICI


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