Page sonorisée


André CARIOU
"L'or brun des faucheurs de la mer"

Amis, très fidèles visiteurs de nos pages en ligne, vous aimez, nous le constatons, un peu plus, chaque jour, bien évidemment et viscéralement... la Bretagne !

Pour certains d’entre vous, peut-être, êtes-vous attirés, plus particulièrement, par les paysages et les us et coutumes de son exceptionnel littoral lié à ses spécifiques activités maritimes traditionnelles, toujours exercées ou appartenant au passé.
Mais, aussi, et plus généralement, si vos goûts vont vers l’histoire de l'art, la peinture, la substantielle et nourrissante écriture d’un auteur érudit qui sait nous faire partager le fruit de ses nombreuses et denses années de recherches pour nous conter, au travers de l‘art pictural, avec acuité, précision et authenticité, des aspects de l’histoire de la Bretagne et des Bretons, vous allez être comblés, par cette nouvelle, conséquente, passionnante, fort esthétique parution consacrée à un sujet inédit, celui des moissonneurs de la mer qui collectaient, ce que l’on nomme, souvent, indifféremment, algues, varech… ou goémon.

André CARIOU, que vous aviez, déjà, rencontré sur les pages de Culture et celtie, l’e-MAGazine pour ses excellents ouvrages « Douarnenez et ses environs vus par les peintres » (Notre chronique) et « Morlaix et sa baie vues par les peintres, entre Léon et Trégor » (Notre chronique), signe, cette fois, toujours publié aux éditions Coop Breizh, « L’or brun des faucheurs de la mer », un splendide livre d’art consacré aux activités goémonières vues par les peintres, en Bretagne.


L’auteur, historien de l’art et conservateur en chef du patrimoine, ancien directeur du Musée des Beaux-Arts de Quimper, spécialiste de la peinture d’inspiration bretonne de l’école de Pont-Aven, nous propose, et c’est une grande première, un très solide ouvrage voué à la représentation picturale des activités de cette paysannerie maritime qui travaillait dur, très dur, pour récolter, entre Quiberon, au sud et la côte d’Emeraude, au nord, cette ressource naturelle nécessaire à la production de l’iode ou à son utilisation en tant qu’engrais.

Ce « beau livre » de 256 pages, réunit depuis les années du romantisme jusqu’à celles de l’abstraction, plus de 350 superbes reproductions d’estampes et de peintures réalisées par plus de 120 peintres qui ont trouvé inspiration dans ce thème, jusque là, inédit.



André CARIOU © Photo X - Composition GS

Les différentes phases de l’harassant travail des goémoniers et goémonières sont, ainsi, artistiquement abordées, de la récolte sur les plages et dans les rochers, au transport sur brancards, bateaux, barges ou charrettes, en vue du séchage en bord de mer, jusqu’à la confection de meules, puis de l’épandage sur les terres agricoles, le brûlage sur les dunes, ou le traitement de ces « herbes maritimes », en usine.

Tout au long de l’ouvrage, des extraits de textes littéraires de qualité certaine corroborent et complètent cette artistique, panoramique et picturale vision, en « peignant », plutôt, en dépeignant par des mots choisis, cette lourde chaîne de labeur.
Parmi ces insertions textuelles, nous ne résistons pas à vous proposer un extrait d’une plus large sélection de phrases retenues par André CARIOU, narration que l’on doit au journaliste, homme de lettres finistérien, auteur particulièrement connu pour son livre « Le Cheval d'orgueil », nous avons nommé, ainsi, Pierre Jacques HELIAS, dit Pierre-Jakez HELIAS, Pêr-Jakez HELIAZ, en langue bretonne.

«Je vols encore les femmes de mon pays entrer clans la mer, en robes, deux à deux, repoussant la vague de toute la force de leur corps bandé. Entre elles, une sorte de civière pareille à une échelle.
Avec la fourche et le râteau, elles ramassaient les haillons roux, butin de la tempête sur les récifs. On aurait dit des cuisinières soigneuses, occupées à écumer une énorme soupe à l’oignon. Quelle étonnante moisson qui n‘était précédée d’aucune semaille ! Ensuite, Il fallait monter le goémon sur la falaise, l’étaler sur l'herbe courte pour la faire sécher. Je vols encore La Palud de Penhrors couverte de varech, à l’exception d’une surface, autour du port, qui était spécialement réservée aux filets
.

[…/…] Plus lard, le goémon sec était mis en tas autour des fours. Ces derniers sont creusés tout à lait au bord, en surplomb de la grève, et dans les lieux les plus élevés pour bénéficier du plus de vent possible. On peut les y voir encore, bien qu‘ils soient parfaitement abandonnés. Des sortes de fosses pour enterrer, au ras du sol, des corps d‘hommes un peu trop longs de taille, un peu trop étroits d’épaules. L’intérieur en est revêtu de pierres plates.

[…/…] Le temps du brûlage venu, les goémoniers compartimentaient le four avec des pierres plates, chaque compartiment aux dimensions d’un pain de dix livres. On remplissait avec des fourchées de goémon et on mettait le feu. Venait alors le plus dur du travail. Il fallait alimenter le feu sans cesse, le tenir en surveillance pour l'empêcher de flamber, tourner le goémon pour désenfumer le tas, composer la pâte qui bouillait et qui ferait le pain de soude, une fois refroidie.
Le plaisir était le lot des enfants, toujours attirés par la fête du goémon.
Ils gobaient la fumée en sautant pardessus la fosse, les yeux fermés, bouche ouverte. Mais les hommes peinaient dur à tasser au pifon cette bouillie qui durcirait au cours de la nuit. A !’aube, toujours avec le pifon, cinq ou six pains de soude seront dégagés et sortis du four. Il faut se garder de les casser. Ce serait montrer à l’acheteur qu’ils n’ont pas été bien faits.
Un camion viendra charger les pains pour les emmener à l’usine. Aujourd'hui, ce même camion ramasse le goémon sec, l’usine fait le reste. On ne brûle plus sur les côtes.
[…/…]
« Goémons » dans « Vivre en Cornouaille », Brest : édition de la Cité 1972, pp. 241-Z42.

L’ouvrage « L’or brun des faucheurs de la mer », d’André CARIOU est, à la fois, pédagogique, didactique et spectaculaire, par la richesse des couleurs, passant, selon les œuvres, des ténèbres, aux plus vives lumières, l’expressivité des gestes des personnages captés aux bons moments par les artistes, la grande variété des styles picturaux et des mises en page des toiles. Quelle belle fresque thématique ! La rudoyeuse beauté du courage de ces gens de mer, semble rejoindre l’esthétique, souvent acérée, de la côte bretonne.

Amoureux de la Bretagne, de son histoire, d’ethnologie, de peinture, des mots et de la connaissance, voire, tout simplement, admirateurs de la beauté des paysages et du courage des femmes et des hommes qui, depuis des lustres, les animent et traditionnellement, économiquement, vitalement, leur donnent vie, « L’or brun des faucheurs de la mer » d’André CARIOU est un livre indispensable à vous procurer, au plus vite.

Son sommaire est le suivant :
- Avant-propos
1 - L’or brun.
2 - Premières représentations.
3 - Le goémon à la façon synthétiste.
4 - L’âge d’or du Pays bigouden.
5 - Autres rivages avant la Grande Guerre, de Belle à Sein.
6 - La côte nord d'0uessant à Bréhat.
7 - Les attraits renouvelés de la baie d'Audierne.
8 - Les derniers feux.
- Conclusion.

Vous lirez, relirez, feuilletterez, consulterez, à nouveau, sur des points précis ce fort attractif ouvrage. Son indexation alphabétique finale en matière de noms de peintres, dessinateurs, sculpteurs et photographes dont les œuvres sont reproduites, ainsi que pour les auteurs de textes littéraires faisant l’objet d’un encadré, faciliteront vos divers usages, vos nombreux instants de plaisirs, chaque fois, renouvelés.

Gérard SIMON



NB : Respectant les droits d’auteurs, les 6 tableaux dont l'affichage s'alterne toutes les 10 secondes se limitent, strictement, à ceux disponibles au sein de la rubrique « DÉCOUVRIR UN EXTRAIT » du site Internet www.coop-breizh.fr ou dédiés à la « communication presse » et mises en ligne par l’éditeur-distributeur.

Sur le premier rabat du livre d’André CARIOU est imprimé le texte de « La Complainte des goémoniers » (Gwerz ar vizhinaerien).
En voici quelques extraits :

« Le dix-huitième jour de mai
Ils décidèrent en fin d‘après-midi
D’aller le lendemain matin
Faire du goémon aux Sept-Iles. »
[…/…]

[…/…]
« Le lendemain matin, après s‘être levés
Ils ont embarqué sur le bateau.
Ils ont mis le meilleur mât sur le bateau
Ils ont mis le meilleur mât pour sortir en mer
Pour suivre l'entrée des Sept-Iles
Ils se sont mis à couper du goémon.
Ils ont coupé du goémon de bon cœur
Jusqu'à ce que le bateau soit chargé
Et une fois le bateau chargé
Ils sont montés à bord. »
[…/…]

[…/…]
« Mais la nuit est devenue sombre
Dans un lieu qui était malheureusement dangereux
Et ils ne dirigeaient plus leur gabarre
Car ils avaient touché le rocher
Alors elle vint à prendre l'eau
Sans qu'ils puissent se sauver.
Les matelots n'allaient pas assez vite
Le capitaine est allé les aider
Dépêchez-vous, dit-il,
Amenez la grand‘voile et prenez Le ris.
Le bateau laissé sans gouvernail
Le bateau ballotté par les vagues
Le bateau ballotté par les vagues
Est précipité au fond subitement. »
[…/…]

Cette chanson fait référence à un naufrage dans le coureau des Sept-Iles (Perros-Guirec), en 1806.
Il en existe plusieurs versions successives, ce qui montre la notoriété d'un tel sujet (Daniel Giraudon,
La Clef des chants, histoires de gwerziou, Fouesnant : Editions Yoran Embanner, 2020, pp. 177-213 et 237-258).

Pour ce qui nous concerne, nous avons illustré et sonorisé notre chronique par les trois premiers couplets en breton, d’une autre version, paroles et musique de Denez ABERNOT.


Gwerz ar vezhinerien

« Na pa ‘moa klevet ar c’heleier
E ranke mond kuit ma mestrez
Da vezhinañ d’an enezeier
Trielen ha Molenez

Refrain :

Ho rom di lam di lo
Ho rom di lam di lo
Ho rom di lam di lo

Na pa ‘moa klevet ar c’heloù
E ranke mond kuit mintin mad
Kerkent ha ma save ar gouloù
E save ad dour en ma daoulagad

Refrain

Kar ar vuhez en enezennoù
‘Zo ur vuhez trist ha kalet
Bemdez, bemnoz e-kreiz ar poanioù
Ar vezhinerien ‘zo tud daonet »

Refrain

La complainte des goémoniers

« Quand j'ai appris la nouvelle
que ma bonne amie devait partir
pour ramasser le goémon dans les îles
de Trielen et de Molène

Refrain :

Ho rom di lam di lo
Ho rom di lam di lo
Ho rom di lam di lo

Quand j'ai appris la nouvelle
qu'elle devait partir de bon matin,
dès le lever du jour,
les larmes me sont montées aux yeux

Refrain

Car la vie dans les îles
est une vie triste et dure.
Tous les jours, toutes les nuits à la peine,
les goémoniers sont des damnés. »

Refrain


"L'or brun des faucheurs de la mer".
André CARIOU.
Parution : septembre 2023.
22 x 28 cm - Broché à rabats - 256 pages.
Edition : COOP BREIZH : www.coop-breizh.fr
EAN : 9782843469497 - Référence : 346949.


Illustration de la page : Montage de 3 couplets et versions de Gwerz ar vezhinerien (La complainte des Goémoniers).
Paroles et musique : Denez ABERNOT
Extraits (01:47) - Denez ABERNOT, Album "Archipel" (2000) - Denez PRIGENT, Album "Ar gouriz koar" (1993, réédité en 1996) - Louise EBREL, Bande son d'un film de Tristan Gloaguen, tourné à Quimper, chez la chanteuse (2017).


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